Couverture du livre Accrocs du roc de Terry Pratchett

Le livre Accros du roc, de Terry Pratchett, est le tome 3 de la mini-série "La Mort du Disque-monde", des Annales du Disque-Monde. C'est aussi le premier livre de Pratchett que j'ai lu, offert par une personne très chère. Le premier d'une grosse collection, lue entre 25 et 35 ans, et aujourd'hui un peu oubliée derrière le mur de mangas de ma fille...

L'histoire

Un jeune druide découvre une guitare possédée et monte un groupe de musique avec un troll et un nain pendant que la petite fille de la Mort découvre que son grand-père fait une petite déprime et qu'elle doit faire le boulot à sa place. Je sais, c'est n'importe quoi, résumé comme ça.

— ALBERT…

— Ouim’sieur ?

— JE ME DEMANDAIS…

— Monsieur ?

— A QUOI ÇA RIME, TOUT ÇA ? FRANCHEMENT ? QUAND ON Y RÉFLÉCHIT BIEN ?

Oui à quoi ça rime, bonne question.

Mon avis

Le roman est plaisant et agréable à lire : on sent que Pratchett s'amuse comme un petit fou à décrire la naissance du rock et ses conséquences sur Ankh-Morpork. Le groupe improbable constitué d'un humain ("vaguement elfique"), d'un troll et d'un nain (et même du bibliothécaire, pour un concert unique) donne des scènes hilarantes, un peu à la Donjon de Naheulbeuk. Les mages qui se transforment en rockeurs, l'invention de la moto magique, la description féroce de l'imprésario Planteur "j'me tranche la gorge", tout ça est marrant. Mais aussi relativement "facile" et oubliable, quand on connait les autres aventures du Disque-Monde.

Le plus intéressant c'est l'autre arc du livre, malheureusement moins développé : l'intérim fait par Suzanne, qui doit assumer la lourde responsabilité d'être la Mort. Sa montée en puissance donne lieu à quelques passages succulents :

— Un œuf à la coque, alors ?

— Ah, l’eau bouillante, ça vaut rien, ça tue pas tous les germes.

— FAIS-MOI UN ŒUF À LA COQUE, ALBERT.

La Mort, elle, la vraie, disparaît, cherche du sens à son rôle. Elle s'engage dans la Légion Klatchienne, et vit avec les clochards. Plus rien n'a de sens pour elle. Quand elle reprend ses esprits, elle n'est pas tendre avec le monde et partage son dépit avec sa petite-fille :

« MAIS LA PLUPART DES GENS NE SONT PAS BIEN MALINS ET GÂCHENT LEUR VIE. TU NE T’EN ES PAS APERÇUE ? TU N’AS PAS REGARDÉ UNE VILLE DU HAUT DE TON CHEVAL EN TE DISANT QU’ELLE RESSEMBLE À UNE FOURMILIÈRE GROUILLANTE D’INDIVIDUS AVEUGLES QUI CROIENT À LA RÉALITÉ DE LEUR PETIT MONDE RIDICULE ? TU VOIS LES FENÊTRES ÉCLAIRÉES ET TU AIMERAIS PENSER QUE DES TAS D’HISTOIRES PASSIONNANTES SE DÉROULENT PAR-DERRIÈRE, MAIS TU SAIS EN RÉALITÉ QU’ELLES N’ABRITENT QUE DES ESPRITS OBTUS, BORNÉS, DE VULGAIRES CONSOMMATEURS QUI SE REMPLISSENT LA PANSE, QUI PRENNENT LEURS INSTINCTS POUR DES ÉMOTIONS ET SE FIGURENT QUE LEURS EXISTENCES DÉRISOIRES COMPTENT DAVANTAGE QUE LE MURMURE DU VENT. »

Suzanne découvre son grand-père et une part de vérité sur ses parents. Ce sont les passages que j'ai trouvés les plus touchants et les plus justes, lors de cette relecture.

La Mort essaie, au moins.

Parfois, la seule chose à faire pour les gens, c’est d’être là.

Comme quoi on peut relire Pratchett et y redécouvrir des choses.


⭐⭐⭐ Un Pratchett plaisant.